Quinze mois après le déclenchement de la crise du Covid-19, les responsables de nos maisons, et particulièrement de l’animation, expliquent comment ils ont continué à pratiquer leur métier et à assurer des interactions essentielles, malgré les restrictions sanitaires parfois très contraignantes. Après Howald et Echternach Am Schleeschen, après Belle-Vue et Esch-sur-Alzette, immersion à Wiltz et Niederkorn, où on n’a pas laissé tomber les bras.
Fatalistes ? Certainement pas. Blasées non plus… Evelyne Plawny (Chargée de direction) et Myriam Vanhackendover (Chef de service encadrement et soins) tiennent bon la barre, à Wiltz, après l’année de toutes les interrogations. Continuer à animer la communauté de la résidence Geenzebléi malgré l’offensive du Covid constituait un sacré défi… relevé grâce à la solidarité des équipes. Et même aujourd’hui, alors que la situation n’est pas totalement revenue à la normale, la flexibilité reste la devise des deux femmes : « Pas possible d’aller à Luxembourg pour l’Octave ? Tant pis : nous avons réservé l’église de Wiltz à l’usage exclusif de nos pensionnaires », sourient les deux femmes.
Prudence et diplomatie
Evelyne Plawny a parfois été habitée par le doute : « Nous devions affronter une pathologie que personne ne connaissait. Nous n’étions donc pas sûrs à 100% de l’efficacité des mesures que nous mettions en place, et nous avons même parfois été confrontés à des instructions contradictoires, sur le port du masque, l’isolement, la nécessité d’éviter les contacts, les mises en quarantaine… puisque le virus révélait ses secrets progressivement. Et pendant ce temps, les familles étaient demandeuses d’informations… que nous ne pouvions pas leur donner, puisque nous ne les avions pas. » Des moments qui incitent à la fois à la prudence… et à la diplomatie. A Niederkorn, Monia Bausch, responsable de l’animation, a connu les mêmes pressions : « Rassurer les familles inquiètes, c’était vraiment le plus dur. Forcément, on les comprenait, mais il y avait aussi la sécurité de tous à assurer. Mais comme le problème du Covid est universel, le message était peut-être plus facile à faire passer. Moi qui aime travailler avec les gens, j’ai connu de vrais moments de joie, et j’ai appris à mieux connaître les familles. Elles avaient besoin de parler. Aujourd’hui encore, ce besoin est très sensible. J’ai toujours cherché à rester positive : il n’était pas question d’amener avec moi au travail mes craintes et mes doutes.»
Contacts internes, liens externes
A Wiltz, la crise a fait redécouvrir le bon vieux courrier postal ! Ce lien essentiel avec les familles, privées de visites, il fallait le maintenir à tout prix en période de confinement. Un timbre, une enveloppe, un peu de nostalgie, et le tour était joué… pour les non-connectés. Car ce que l’on retiendra de la crise, c’est d’abord la forte pénétration des tablettes et visio-conférences dans les résidences SERVIOR. « Zoom, Skype, et autres n’ont plus de secrets pour nous, sourit Myriam Vanhackendover. Au début, le personnel a utilisé son propre matériel, puis SERVIOR nous a rapidement équipés en matériel, et nous n’avons pas eu trop de problèmes pour joindre régulièrement toutes les familles. Mais, aujourd’hui encore, des bénévoles nous envoient encore par courrier des poèmes ou des histoires à raconter à nos résidents.»
Le restaurant, carrefour de vie
Les familles, c’est une chose. Mais un autre lien, tout aussi important, a souffert de la crise : celui avec les autres habitants de nos maisons. Lors des périodes où chacun était confiné dans son logement, l’absence des camarades de table ou de jeux s’est fait sentir. « L’impossibilité de manger au restaurant, même temporaire, c’est un moment très délicat psychologiquement, explique Evelyne Plawny. Imaginez ce pensionnaire qui, tous les jours, descend au bar à 16 heures pour consommer un verre de bière sans alcool et qui, du jour au lendemain, est privé de son rituel ! L’arrivée opportune dans notre équipe d’une psychologue nous a beaucoup aidés. Nous avons eu à cœur de continuer à offrir un double choix de repas à nos hôtes, même en chambre. Et nous avons organisé des contacts entre résidents, par tablette s’il le fallait, et progressivement en petits groupes. » Aujourd’hui, le restaurant, si appréciée salle à manger des résidents, fonctionne presque normalement… et confirme son rôle de pôle phare de l’établissement en accueillant régulièrement la messe.
Pas de chant ? Du rythme, alors !
« La flexibilité, c’est le mot qui résume sans doute le mieux ces mois si spéciaux, confirme Monia Bausch. Avant, on avait un calendrier, une ligne du temps. Aujourd’hui, il faut toujours être prêt à s’adapter, à improviser. Quand il était impossible de travailler en groupe, nous sommes allés en chambre, en individuel. Et là, le contact est plus personnel, plus intime presque. Les gens me livraient leurs pensées, me parlaient de leurs peurs. Moi, je voulais surtout leur donner un but pour le futur ! Pour Noël, nous avons écrit une chanson, dont nous avons fait une vidéo. Nous remettons cela actuellement avec une chanson d’été. Nous avons fait des mini-fêtes de Noël, à cinq ou six. Niederkorn est une maison festive : le chant, la fête, les concerts, les grillades dans le jardin, la pétanque… Il ne fallait pas oublier cet esprit. On ne peut pas chanter à cause du virus ? Qu’à cela ne tienne : on écrit des poèmes et on les lit. On fait du rythme, avec des bouteilles, et de la gymnastique rythmique aussi, pour maintenir une indispensable activité physique ».
« La mobilité, la motricité et l’entretien des capacités cognitives constituent des besoins essentiels pour les personnes qui résident chez nous, en plus des contacts dont nous parlions précédemment, abonde Evelyne Plawny. Tout a donc été mis en œuvre pour éviter autant que possible qu’un déficit s’instaure à cause de la crise sanitaire ». A Wiltz comme à Niederkorn, la situation reste très encadrée, mais le plus dur paraît révolu. Dès que le soleil pointe ses rayons, les occasions de sortie dans le parc se multiplient… parfois dans la bonne odeur des gaufres, comme à Niederkorn. Le retour des visites de familles a réellement stimulé le moral des habitants de nos maisons.